Corée du sud : palais, temples et rougeoiement
Entrer au « pays du matin calme » ne nous a pris qu’une demi-heure : toute petite fouille du Truck, pas de carte Sim à trouver (le réseau est le plus développé du monde, nous avons régulièrement capté de bons wifi ouverts), pas de visa (pour la 1ère fois depuis la Bulgarie!)l’assurance locale est prise avec l’aide de la compagnie de ferry. Nous n’avons plus qu’à tirer des wons, et l’opération s’avère plus compliquée qu’attendue : seule la banque KB accepte uniquement les cartes Visa.
Nous entamons notre tour par le nord pour profiter du climat encore doux qui y règne en ce début de mois de novembre et faisons une première halte au marché au poisson que nous découvrons au port de pêche de Donghae. Impressionnés par la quantité et la taille des poissons, nous y restons une bonne heure à voir tout le monde marin frais et vivant se faire dépecer sur place en sushis à déguster immédiatement !
Nous poursuivons sur la côte et faisons une halte bien méritée sur une plage immense et déserte avant de partir visiter un temple plein de charme et posé au bord de la mer.
Déjà nous sentons un accueil exceptionnel de la part des Coréens, trop curieux, ils ne peuvent s’empêcher de glisser le nez dans le camion, ils viennent nous parler spontanément sans cesse, un couple nous voit attablés et fait un détour pour aller nous acheter des glaces, un monsieur se lève au restaurant pour offrir des cocas à tout le monde, plusieurs fois des chauffeurs routiers nous ont donné tout le stock de victuailles qu’ils avaient dans leur camion… les selfies recommencent. En fait nous ne pouvons pas sortir du camion sans attirer des nuées et déjà nous accumulons les cadeaux !
Fait assez amusant les prénoms Kim, Lee et Park couvrent à eux seuls 50% de la population ! Difficile de se tromper…
Le lendemain nous visitons une maison traditionnelle « aux bambous noirs » où repose un éminent confucéen. En sortant nous faisons l’attraction dans la première boutique de souvenirs et la propriétaire nous fait un cadeau à chacun et nous invite immédiatement à diner avec des amis de passage !
Nous en profitons pour nous faire indiquer un lieu où laver le linge (depuis la Turquie ce genre d’endroit n’existait pas) et y passons la journée du lendemain. Avec les habits, manteaux, housses, draps, rideaux, oreillers et couettes… nous avons réussi à faire tourner 70kg !
Nous nous précipitons ensuite dans les parcs nationaux de Odaesan et de Seoraksan, nous sommes encore dans la saison du « rougeoiement » des érables qui se termine bientôt : à cette période des coréens suréquipés inondent les parcs pour randonner et se gonfler de l’énergie de la montagne. Les paysages sont superbes, comme sur les estampes de nos imaginaires…
Nous nous sommes rapidement rendus compte qu’en comparaison avec la Sibérie le pays était bien plus petit ! Nous n’avons que 20 à 30km à rouler tous les jours ce qui n’est pas suffisant pour le travail scolaire : changement de rythme donc, nous travaillons le matin et partons visiter lorsque tout le monde a terminé ses pages du jour.
Nos premières impressions sont l’étonnement de trouver des gens et des villes si bien organisés : des miroirs sont installés pour voir les plafonds sans avoir à lever la tête dans les temples, les feuilles de salade sont rangées dans les rares supermarchés, les pas sont dessinés au sol pour montrer le sens de la visite dans les musées et les endroits pour prendre « la plus belle photo », il y a même des plans qui nous montrent où ils sont. Des panneaux expliquant ce qu’il faut faire en cas de tsunami sont plantés tous les 30m sur les côtes… alors qu’il n’y a jamais eu de tsunamis. Les toilettes publiques (impeccables, gratuites… et plus basses que chez nous !) s’allument toutes seules et enclenchent de la musique classique dès qu’on passe le pas de la porte, on se retrouve alors avec des lunettes chauffantes et un tableau de bord à option à notre droite - ça change du trou sans porte des toilettes publiques payantes Turkmènes ! En balade chaque arbre est étiqueté de son nom, s’il pleut des sacs en plastique sont disposés pour emballer les parapluies mouillés, il y a des douchettes à air pour s’épousseter en sortant des lieux de randonnée, ainsi que des sprays anti-moustiques publiques. Le résultat y est : tout est calme, clair, propre, fignolé, esthétique…
Tout aussi bien organisé le tourisme est rendu extrêmement facile, on trouve parkings et panneaux indicatifs dans tout le pays, des stewards sillonnent les marchés et quartiers touristiques en distribuant des plans et répondant aux éventuelles questions, des bureaux de tourisme sont visibles à tous les coins de rue, distribuent brochures en quantité, toujours en anglais et parfois en français… Il existe même une « hot line » où l’on peut appeler 24/24h pour trouver un interlocuteur anglophone apte à faire n’importe quelle réservation pour nous (spectacle, hôtel, ferry, etc.). Etonnamment nous avons pourtant croisé si peu de touristes étrangers… ajouté au fait qu’il n’y a pas de minorité ethnique en Corée (excepté les 30.000 GI américains qui vivent à Séoul) nous avons eu l’impression que seuls les coréens profitaient de ces aménagements et de leur pays.
A contre-sens par rapport à de très nombreux chars d’assaut filant vers l’est (mouvements dus à la visite de Trump sans doute), nous passons la chaine de montagne et le col non loin de là où se dérouleront les jeux olympiques d’hiver de Pyeong Chang dans trois mois pour nous rendre à Séoul. Nous faisons un premier bivouac près de la rivière Han et en face du stade olympique de 1988 pour faire le plein d’eau potable à une fontaine accessible repérée sur MAPS.ME. Le lendemain nous nous jetons dans la ville essayant d’y trouver une place pour se garer plus près du centre mais l’opération s’avère impossible. Personne ne peut se garer dans les rues qui ne sont pas aménagées à cet effet, et les parkings sont tous trop limités pour nous en hauteur… Nous avons tenté de négocier de payer un parking d’hôtel chic, mais sans succès. Au bout de plusieurs heures nous avons finalement dû nous résoudre à retourner de l’autre côté de la rivière Han, où nous avons trouvé un parking payant, mais en plein air, et proche d’une station de métro. Plus tard nous avons fait une nouvelle tentative et avons fini par poser le Truck au parking du palais principal en journée (tarif plafonné à 11 euros par jour) et avons dormi sur le parking d’un poste de police en plein centre-ville ouvert et gratuit de 19h à 9h.
Nous sommes restés 10 jours à sillonner la ville nuit et jour pour voir quatre palais (palais du bonheur radieux, palais de la longévité vertueuse, palais de la félicité radieuse, palais de la vive réjouissance), autant de quartiers différents et animés, des musées d’art contemporains, le musée national, le musée folklorique, le grand musée de la guerre de Corée (le pays est toujours officiellement en guerre avec la Corée du nord, la zone frontière se visite d’ailleurs touristiquement mais lorsqu’on a voulu réserver le tour était suspendu jusqu’à nouvel ordre), les bâtiments d’architecture contemporaine, le plus grand marché d’Asie, les nouvelles promenades, nous avons assisté à quelques spectacles (Nanta, de taekwondo, la pièce chantée traditionnelle des masques) et nous sommes montés à la tour de Séoul pour nous rendre compte de l’étendue de la ville de nuit…
Nous nous sommes enfuis de cette ville où il y avait encore bien des choses à voir en étant épuisés !
Et frigorifiés : nos batteries avaient donné des signes d’alerte à Vladivostok et ont rendu l’âme à l’arrivée dans la ville, empêchant l’utilisation du chauffage et du frigo. Nous avons passé toutes les nuits à avoir bien froid et à attraper des rhumes en attendant de sortir de cette immense ville pour trouver un petit garage et les changer.
En sortant de Séoul nous sommes passés voir une belle forteresse parfaitement bien restaurée, comme l’ensemble des bâtiments du pays, avant d’aller fêter les 11 ans de notre ainé dans LE parc d’attraction coréen ! Faisant route vers le sud nous avons essuyé une tempête de neige avant d’atteindre la côte et des températures de nouveau plus chaudes. Nous y avons apprécié un musée du céladon, permettant aux enfants de s’initier à la poterie, ainsi que les vues sur les iles au large et les plantations de riz et de thé.
Globalement le pays compte d’anciennes villes encore bien préservées (villages folkloriques), des forteresses, des palais, des jardins et pavillons littéraires, des tombes (énormes tumulus impressionnants), des sources chaudes (devenues nos bains/douches nous avons dû céder sur nos maillots : 50 coréennes chez les femmes, et autant chez les hommes, s’y astiquent nus comme des vers), des parcs nationaux et des temples… beaucoup de temples. Etonnamment 50% de la population est chrétienne (mi- catholique, mi- protestante), 25% est bouddhiste et les temples sont plutôt bouddhistes (apprentissage des sutras et méditation) mais il existe un véritable syncrétisme religieux et des éléments de plusieurs autres religions y apparaissent aussi. On y retrouve des éléments taoïstes (principe du yin et du yang, médecines et astrologie chinoise, géomancie), et surtout confucianistes : longtemps religion d’état dans le pays (tombes avec des stèles sur des tortues de pierre, culte des ancêtres et du clan, sens fort de la hiérarchie, surinvestissement de l’éducation). Le chamanisme est encore bien présent également (cérémonies de protection et de désenvoutement) ainsi que des croyances populaires (esprit de la montagne, du foyer, ou du village à qui on donne du riz à manger).
En parcourant le pays on se rend compte à quel point chaque espace est aménagé, il est absolument impossible de trouver un endroit « sauvage ». Même ceux-ci sont transformés en « parcs nationaux » avec parking et droit d’entrée. Nous avons régulièrement du payer nos parkings la nuit. L’industrialisation et l’économie du pays est largement portée par les chaebols (conglomérats) de Hyundai, Samsung, LG, Lotte, Daewoo etc. qui possèdent tous des entreprises diversifiées (téléphonie, automobile, hôpitaux, musées, centres commerciaux, parcs d’attractions, et énormes lots d’immeubles défigurant une partie du territoire). Le niveau de vie est relativement élevé, les prix sont comparables à nos prix européens. Nous avons eu globalement beaucoup plus de mal à nous alimenter : les restaurants sont aussi chers que chez nous et les plats sont très épicés. Il n’y a pas de supermarché, que de petits magasins de proximité qui vendent plutôt des plats préparés. Les fruits et légumes sont particulièrement chers et vendus en très petite quantité. Beaucoup d’aliments nous sont inconnus, les emballages n’étant de surcroit qu’en coréen. Nous avons régulièrement dû opter pour un plan dépanne de nouilles à réhydrater (sans mettre les épices qui sont atrocement piquantes).
Avant de quitter le pays nous avons de nouveau procédé à un grand ménage nécessaire à l'importation au Japon. Il faut aussi se débarrasser de tous produits d'origine animale. Les inspecteurs font des analyses à l'arrivée pour les drogues... de ce côté là on n'est pas concerné mais pour les autres autant le savoir!
Nous avons un peu avancé dans l’élaboration de notre nouvel itinéraire en demandant des devis pour shipper notre Truck du Japon vers l’Australie et les prix sont prohibitifs (8.000 euros au moins), nous avons donc fait le choix de ramener ensuite le Truck en Corée pour shipper en Asie du Sud Est, les prix étant nettement plus bas pour faire ce genre de trajet. A moins d’une semaine de quitter le pays nous apprenons qu’une autre compagnie de ferry (Camellia Lines) que celle que nous avons réservé (DBS) permet de faire un aller-retour vers le Japon pour la moitié du prix que l’on nous demandait. Hélas il faut une semaine à cette nouvelle compagnie pour procéder à l’enregistrement de notre Carnet de Passage au Japon ainsi qu’à la traduction de notre permis en japonais. De plus notre assurance coréenne se termine ainsi que le document d’import/export émis à l’arrivée. Nous ne pouvons donc plus annuler notre 1ère réservation faute de temps… Pour ceux qui préparent ce genre de voyage : au final nous aurons payé près de 2000 euros pour venir de Vladivostok et 1300 pour aller au Japon par DBS (c’est le prix aller-retour par Camellia)!
Nous avons également appris que notre périple au Japon ne serait pas qu’une partie de plaisir : les véhicules sont des pots de yaourts qui circulent sur des routes qui ne sont pas toutes à double sens. Les autoroutes sont très chères, tout le jeu semble être de parvenir à repérer les grandes routes secondaires où s’entassent les camions et où l’on avance à 20-30km/h ! Les parkings sont très difficiles à trouver, très chers et il n’y a pas de possibilité d’approcher les grandes villes avec notre mastodonte. Nous allons probablement devoir laisser notre Truck à 70km de Tokyo ! Bref… on se prépare à des complications… et pas tout à fait les mêmes que celles qu’on trouve en Mongolie !